Allocutions et interventions

Clôture de la Deuxième Session de L’assemblée Nationale du Pouvoir Populaire, le 24 décembre 1977

Date: 

24/12/1977

 

Chers compañeros,

Nous ne souhaitons pas établir un précédent ou une tradition consistant à clôturer chaque session par un discours plus ou moins long. Il n'y a pas toujours de choses importantes à signaler et, de plus, en règle générale, c'est au compañero Blas Roca qu'il revient de prononcer le discours de clôture, dans le style concis et précis qui est le sien. Mais aujourd'hui, notre Assemblée nationale arrive pratiquement au terme de sa première année d'existence. Il nous semble que la date est importante, que les résultats sont importants et, aussi, que le moment est important.

Avant de poursuivre, je dois vous dire que le compañero Raúl ne s’est pas trouvé parmi nous au cours de ces travaux, car il effectue actuellement un voyage à l'étranger, où il s'acquitte de tâches importantes qui lui ont été confiées par le Parti (Applaudissements). Il m'a demandé de vous faire savoir à quel point il regrettait de ne pas être parmi nous ces jours-ci.

Le compañero Carlos Rafael est également absent, le Parti lui ayant aussi assigné des tâches importantes à l'étranger. En son nom, je vous demande d’excuser son absence (Applaudissements).

Nous venons de réaliser un travail important. Pour la première fois, l'Assemblée nationale a analysé le plan économique ou les directives du plan économique pour l'année suivante, ainsi que notre budget de dépenses. L'Assemblée a approuvé une loi importante interdisant la création de nouveaux salaires historiques, ce qui contribuera à mettre de l'ordre dans notre politique salariale tout en renforçant notre économie et en facilitant l'implantation de notre système de direction. Elle a également approuvé une législation très importante sur la protection et l'hygiène du travail, ainsi que la loi des droits d'auteur, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle a fait l'objet de débats prolongés.

Disons pour plaisanter qu’on a finalement retiré les références aux « moyens photomécaniques », ce qui ne nous a pas empêchés de donner finalement à la loi un titre cacophonique. Je préférais « sur les droits d'auteur » à « des droits d’auteur ». L’autre titre me semblait plus poétique, plus rythmique, et comme il s'agissait d'auteurs, de poètes, etc., j'étais partisan de l'autre titre, mais nous n'allions pas entamer la discussion sur le titre que devait porter la loi. Ce n'était pas un problème de fond, ce n'était pas une question fondamentale.

Nous avons analysé à fond un problème d'une importance capitale : celui du logement. Plus encore, je crois que la discussion nous a aidés à prendre conscience de l'ampleur et de l'importance du problème.


 

De nombreuses questions ont été largement débattues, avec un esprit magnifique.

Je crois qu'à l'avenir nous pourrons étendre et approfondir les débats sur un thème aussi important que le plan économique, que nous pourrons envoyer à l'Assemblée les documents en temps voulu pour qu'elle puisse les analyser, pour qu'elle soit mieux à même de donner une opinion, de participer et de comprendre, en dépit des caractéristiques hautement techniques d'un plan économique, pour que l'analyse du plan économique et du budget soit plus profonde.

Si je devais parler des sentiments que j'éprouvais en voyant approcher la fin de cette session, je dirais que, dans mon cas au moins, je n'étais pas, pour une fois, enthousiasmé à l'idée de mettre fin aux travaux : car en réalité, en très peu de temps, il s’est créé un climat, une atmosphère, une qualité véritablement extraordinaires.

Il me semble que le prestige de notre Assemblée nationale et que son autorité grandissent rapidement, et même de façon surprenante. Il s'agit là d'un véritable succès de notre Révolution et de l’accomplissement des objectifs et des aspirations de notre Parti, qui tenait à fonder nos institutions révolutionnaires sur des bases très solides.

Nous estimons que les progrès sont très encourageants. Dans cette Assemblée, il règne un esprit, un climat qui, à mon avis, est le fruit de tout le développement de la Révolution, des progrès que nous avons faits dans tous les domaines, et aussi de la qualité des membres de cette Assemblée.

Ici, les débats sont très vastes et absolument libres : comme il convient, nous ne tenons pas compte du fait que nos réunions sont publiques ou secrètes, et nous ne craignons pas d'analyser n'importe quel problème ou de discuter n'importe quelle question, bonne ou mauvaise, devant tout notre peuple, et pas seulement devant notre peuple, mais aussi devant le monde entier (applaudissements).

Lorsqu'un pays peut parler aussi clairement, aussi courageusement, il y a lieu de se sentir satisfait. Et ce ne sont pas les règlements qui régissent notre action au sein de l'Assemblée, voilà peut-être ce qu'il y a de plus admirable, mais le climat de respect, de camaraderie, de fraternité qui règne parmi nous, sans oublier le moins du monde le courage, la sincérité et l'honnêteté de nos exposés. Personne ne nous limite, nous nous limitons nous-mêmes, chacun d'entre nous, car nous savons ce que nous devons faire, comment nous devons agir. Et c'est ici, grâce à l'intérêt commun dans la cause que nous représentons, que se manifeste la supériorité de notre démocratie sur la dénommée démocratie bourgeoise et capitaliste (applaudissements).

Cette Assemblée ne craindra jamais pour sa vie; personne ne viendra jamais dissoudre notre Assemblée nationale, parce que notre Assemblée représenté justement notre peuple travailleur, soit ce qu'il y a de meilleur, et l'immense majorité de notre peuple, et elle peut aller de l'avant sans se heurter à aucune sorte de contradiction.

Peut-être que les impérialistes souhaitent voir disparaître notre Assemblée et, avec elle, le socialisme dans notre patrie. Mais nous savons, et ils le savent aussi, que cela est impossible. Ils souhaitent peut-être que ce théâtre s'écroule un jour. Mais il ne va pas s'écrouler ; il a été bien reconstruit (applaudissements). Peut-être que les ennemis contre-révolutionnaires de l’étranger, pétris d’impuissance et de haine, souhaitent attaquer un jour notre théâtre. Nous pensons que ce n'est pas facile, car notre théâtre est bien gardé (applaudissements). Mais si par hasard, un jour, ce théâtre venait à s'écrouler sur nos têtes, dès le lendemain, on commencerait à organiser à nouveau l’élection des dirigeants du Parti et de la nouvelle Assemblée nationale (applaudissements prolongés).

Nous existons au-delà des hommes ou des groupes d'hommes, au-delà des leaders ou des groupes de leaders, et ce sont ces réalités objectives qui renforcent la conviction que nous travaillons et luttons pour une œuvre vraiment durable, et nous savons qu'il y a bien peu de – et certainement aucun sur notre continent – où l'on puisse faire des affirmations de ce genre.

Nous croyons que la qualité extraordinaire de noire Assemblée n'est pas due seulement à la présence de nombreux cadres chevronnés du Parti et de l'État, mais aussi à la présence des députés provenant directement de la base, élus directement par la base, et qui constituent la majorité de cette Assemblée.

Quant à la méthode établie, les faits démontrent qu'elle est vraiment bonne. Ainsi, à l'expérience et aux connaissances globales d'une partie de l'Assemblée viennent s'ajouter l'expérience directe et le contact quotidien avec les masses que nous apportent les délégués issus des circonscriptions (Applaudissements).

Il se peut que parmi nous il y ait des hommes plus instruits que d’autres, plus expérimentés que d'autres, plus savants que d'autres ; mais notre savoir à nous sera toujours mille fois plus grand que le savoir du plus savant des hommes (applaudissements).

Notre institution ne vient pas remplir une formalité constitutionnelle ; c'est une force, c'est une réalité, et dans la conscience de notre Révolution et de notre peuple, cela devient de plus en plus évident.

Nous devons signaler que, dans une grande mesure, la rapidité du processus de consolidation de l'Assemblée nationale du pouvoir populaire, de ses commissions –commissions qui viennent d'être créées et qui sont déjà capables d’élaborer des résolutions sérieuses et profondes, comme nous l'avons vu ici – est le fruit de l'intelligence, de la sagesse, de la compétence, du génie et même de l’humour avec lesquels le compañero Blas Roca a su diriger ces débats (applaudissements).

Je ne sais comment seront nos futures Assemblées nationales. Elles auront sans doute, en général, un niveau de culture et des connaissances techniques bien supérieures, dont l'importance se reflète déjà dans le travail de certains députés ayant fait des études universitaires. Sans doute, elles feront preuve de plus de connaissances et nous devons nous en réjouir. Mais nous sommes également convaincus que cette première Assemblée nationale, grâce à son travail, à ses efforts, à sa qualité, laissera son nom dans l'histoire en tant que fondatrice compétente et brillante des institutions démocratiques de notre État socialiste.

Je vous disais tout à l’heure que le moment que nous vivons était important pour notre pays. Vous avez pu vous en rendre compte lors de l’examen des directives de notre économie pour 1978.

L'année 1977 a été très difficile pour notre Révolution. Vous qui êtes députés, vous savez parfaitement quelles sont les difficultés auxquelles nous nous sommes heurtés et qui sont dues à la situation réelle, objective, que traverse le inonde.

Disons qu'à l'heure actuelle, exception faite d'une poignée de pays pétroliers et mis à part la communauté socialiste, le monde capitaliste développé et le monde sous-développé non pétrolier traversent une crise économique très grave, dont nul ne sait comment sortir, pas même les théoriciens les plus perspicaces et les plus expérimentés du capitalisme. Les problèmes sont extrêmement sérieux.

La situation la plus grave est celle que connaissent les pays sous-développés – les pays sous-développés non pétroliers – car la dépression causée par la crise économique internationale affecte les prix et les marchés : l'énergie – c'est-à-dire le pétrole – coûte cinq fois plus cher, les produits semi-finis et les équipements, trois fois plus cher, tandis que les matières premières qu'ils exportent sont vendues a des prix dérisoires.

Il suffit d'un exemple pour donner une idée de ce que cela signifie: si nous en étions à l'époque d'avant la Révolution, compte tenu des cours du pétrole sur le marché mondial, tout le sucre de Cuba vendu aux prix actuellement en vigueur sur le marché suffirait à peine à l'achat du pétrole consommé par le pays. Certains se demandent quand la Révolution aurait eu lieu à Cuba si elle ne s’était pas produite en 1959, et je suis tenté de répondre : si elle n’avait pas eu lieu en 1959, elle aurait lieu maintenant. Car j'ignore ce qu'il en serait aujourd'hui de notre pays dans les conditions d'alors.

Mais il y a beaucoup de pays qui n'ont pas pu faire la révolution ; ils n’ont pas les relations que nous avons, les marchés qui se sont ouverts après le triomphe de la Révolution et les rapports d’échange qui nous unissent au camp socialiste et, plus particulièrement, à l'Union soviétique. Il suffit de signaler que nous consommons actuellement presque neuf millions de tonnes de pétrole, ou de combustibles – s'il s’agissait de pétrole brut, ce serait plus ; mais nous consommons à la fois du pétrole brut et du pétrole raffiné –, et qu'en 1978 notre consommation de pétrole tournera autour de neuf millions et demi de tonnes. Aux prix en cours sur le marché mondial, cela représente de 800 à 900 millions de dollars. Si nous exportions notre sucre vers les pays capitalistes, aux prix actuels, en supposant que nous puissions vendre cinq millions de tonnes sur le marché capitaliste – ce n’est pas le cas et ce ne sera jamais le cas, naturellement –, ces cinq millions de tonnes de sucre sur le marché libre nous rapporteraient à peine un peu plus de 800 millions de dollars. Pratiquement, cela ne suffirait pas pour payer le pétrole, sans parler de tous les aliments, matières premières, équipements et produits que le pays doit importer. Que serait-il advenu de notre pays sans la Révolution et sans les excellents rapports d'échange que nous avons établis avec le camp socialiste, et en particulier avec l'Union soviétique ?

Néanmoins, de nombreux pays vivent de leur sucre, vivent de leurs matières premières, dont les prix sont très bas ; ils n'ont pas fait la révolution et ils n'ont pas établi les mêmes relations que nous.

Les cours du sucre ont brusquement baissé de six à sept fois ; de plus de 50 cents, ils sont tombés à moins de 8 en peu de temps. En revanche, les prix des pièces de rechange ont triplé, ceux des matières premières et d’une série de produits importés ont considérablement augmenté.

Comme notre pays dépend encore dans une large mesure du commerce avec les pays capitalistes, nous devions naturellement subir les conséquences de cette situation. Le 28 septembre 1976, nous avons exposé à notre peuple ces réalités, qui nous obligeaient même à réduire les objectifs fixés au Congrès pour le quinquennat. Il nous a fallu rendre compte de ces difficultés et, simultanément, tracer une politique qui permette de ne pas affecter le niveau de consommation de la population, de préserver l'essentiel, le niveau de l'alimentation, de l’habillement, de l'éducation, de la santé publique et de l'emploi. Quels sont donc les pays où les niveaux se sont maintenus dans ces domaines malgré la crise ?

Nous assistons à des putschs fascistes. Ces coups d'État fascistes visent à imposer aux masses des restrictions draconiennes en matière de revenus, à abaisser leur niveau de vie. C'est ce qui s’est produit dans de nombreux pays d'Amérique latine et dans le monde entier.

Nous avions dit que nous continuerions à réaliser notre programme d’investissements dans les industries déjà acquises, et qu'il nous faudrait sacrifier quelques nouveaux projets d’investissements ; que les investissements dont nous étions convenus avec les pays socialistes seraient poursuivis, et que les mesures nécessaires seraient adoptées pour que notre peuple ne soit pas affecté par la crise.

Nous pouvons affirmer aujourd'hui que les objectifs fixés le 28 septembre 1976 ont été atteints. L'an dernier, nous avons exposé ces difficultés aux dirigeants du Parti et du secteur agricole en soulignant la nécessité de réaliser un effort particulier, au cours d'une importante réunion ; nous en avons fait part à l'Assemblée nationale et à des milliers de cadres du Parti et de l'État.

Nous n'oublions pas que l'an dernier, lorsque nous avons demandé à tous les camarades de fournir un effort particulier pendant la campagne sucrière qui s'est avérée difficile, parce qu'il a plu de façon anormale précisément pendant la récolte de la canne à sucre ; lorsque nous leur avons exposé la nécessité d'atteindre certains niveaux de production, nous n'oublions pas que la réponse des compañeros à cette demande a été formidable, si bien qu'en dépit des circonstances l'objectif de notre production sucrière pour 1977 a été atteint à presque 100 p. 100.

Nous avons signalé qu'il fallait fournir un effort particulier en matière de désherbage, afin d'accroître la production sucrière de 1978 dans les proportions requises. Tout a été fait pour accomplir ce que nous nous étions proposé le 28 septembre, de façon à ce que la population ne soit pas affectée ; d'autre part, nous nous sommes appuyés sur nos relations internationales, notamment sur nos relations avec l’URSS. L’URSS nous a aidés sous différents rapports, elle nous a aidés à acquérir des marchandises que nous n’avions pas pu nous procurer sur les marchés capitalistes, une quantité de marchandises supplémentaires par rapport au chiffre établi pour cette année. Les Soviétiques nous ont aidés en nous achetant certains produits, notamment une partie du nickel destiné au marché occidental, étant donné que de grandes quantités de nickel invendu s’entassaient dans les entrepôts en raison de la situation économique internationale.

Les démarches que nous avons réalisées ont porté leurs fruits. De plus, nous avons réalisé des efforts sur le plan national en adoptant des mesures telles que : économie des ressources, réajustement, austérité, efficacité, accroissement de la production ; c'est ainsi que nous avons réussi à aller de l'avant avec succès en 1977.

La conjoncture s'annonce plus favorable en 1978. A notre avis, nous avons d'ores et déjà surmonté les difficultés majeures de cette crise internationale — dont on ignore quand elle prendra fin. Et nous les avons surmontées honorablement, sans que pour autant notre pays ait failli à une seule de ses obligations financières internationales (applaudissements).

Voilà pourquoi, croyons-nous, le crédit de Cuba n'a jamais été aussi solide. Alors que des dizaines et des dizaines de pays sont criblés de dettes vis-à-vis des banques capitalistes et des organismes de crédit internationaux – organismes auxquels nous n’avons pas accès, car l'impérialisme a empêché Cuba, au moyen du blocus, d'obtenir des crédits auprès de ces organismes – notre pays s'est acquitté de toutes ses obligations financières internationales.

La dette des pays sous-développés non pétroliers s'élève à quelque trois cents milliards de dollars. Nul ne sait quand et comment ils s'en acquitteront. Certains commencent déjà à parler de la nécessité d'annuler ces dettes. Celles-ci augmentent à un rythme accéléré.

Alors que certains pays ont dû adopter des mesures extrêmes en demandant la prorogation des échéances, etc., notre pays s'est acquitté rigoureusement, au jour dit, en payant jusqu'au dernier centime, des obligations contractées auprès des banques capitalistes. Nous n'avons pas omis et nous n'omettrons pas de payer un seul centime (applaudissements).

Il a fallu recourir à des mesures rigoureuses et fournir un effort important, et malgré tout, comme l'a expliqué ici le compañero Humberto, notre économie se développera notablement en 1978. En 1976, son taux de croissance a été de près de 3,8 p. 100. Ce n’est pas beaucoup, mais c'est déjà quelque chose. Au cours des dernières années, tous les pays capitalistes ont réduit leur production, et ils n'ont pas pu dépasser celle qu'ils avaient enregistrée en 1974. Dans cette conjoncture, notre production s'est accrue de 3,8 p. 100 en 1976 et d'un peu plus de 4 p. 100 en 1977, sans compter le secteur commercial, et elle doit s'accroître de 7,4 p. 100 en 1978, en dépit de la grave crise économique internationale.

Et il est logique que nous enregistrions une croissance. Comme on l’a expliqué ici, plus de cent nouvelles unités industrielles construites au cours des dernières années entrent en service. Nos constructions s'accroissent considérablement, notre production agricole et notamment la production sucrière s'accroissent considérablement. Nous avons produit X tonnes de sucre en 1977, la production sucrière augmentera de plus de 15 p. 100 en 1978, si mes calculs sont exacts.

Certaines de nos usines de matériaux de construction tournent à plein rendement. Par exemple, le plan des cimenteries est d'atteindre une production de 2 700 000 tonnes, ce qui représente presque 100 p. 100 de leur capacité de production. L’efficacité du travail et la productivité augmentent et, grâce au sucre, à la construction et à d'autres secteurs de la production, on prévoit un accroissement du produit social global de 7,4 p. 100 et, qui plus est, sur des bases financières plus solides.

Les échanges commerciaux avec les pays socialistes ont augmenté, et nous leur avons acheté plus de produits. Le commerce s'est intensifié tout spécialement avec l'Union soviétique, et nous lui avons acheté davantage de produits. L'augmentation de la production sucrière à elle seule rapportera environ 200 millions de pesos de plus en monnaie étrangère ; je dis bien, l'augmentation de la production sucrière à elle seule ! Autrement dit, bien que la crise continue de sévir dans le monde, nous, en augmentant de 15 p. 100 la production de sucre, nous verrons croître nos revenus en monnaie étrangère de plus de 200 millions.

Les autres exportations augmentent également. Nous allons même exporter des bouteilles, les bouteilles en excédent. Nous exportons davantage de poisson, de ciment, de produits divers, et les revenus en monnaie étrangère s'accroissent par des voies diverses.

Bref, nous avons consolidé notre crédit, nous avons surmonté de graves obstacles, nous avons épargné à notre peuple de grands sacrifices, nous avons garanti une croissance plus que satisfaisante de notre économie pour l'an prochain et surtout, nous créons les conditions de l'avenir, nous créons de meilleures conditions pour l'avenir.

Mais n’avons-nous fait qu’épargner des sacrifices à notre peuple, qui a déjà dû réduire sa consommation de café ? Nous savons que certaines difficultés d'approvisionnement, de livraison, etc., se sont présentées. Nous sommes-nous contentés d'éviter ces grands sacrifices ? Non, nous avons progressé. Et le progrès ne se mesure pas seulement en tonnes de ciment, au nombre de constructions, etc., soit à la quantité des biens matériels produits.

Ces problèmes se sont posés après le Congrès.

Combien d'écoles avons-nous construites, combien d'hôpitaux, combien de polycliniques, combien de jardins d'enfants? Nous n'avons pas été freinés dans notre progrès, loin de là.

Si en 1975 nous avions 590 000 élèves dans l'enseignement secondaire, en septembre 1978, nous en aurons 1 050 000. Quel pays de notre taille peut dire, à cette époque, au milieu de ces crises, dans ces conditions, que le nombre de ses élèves de l'enseignement secondaire s'est accru de près d'un demi-million en trois ans seulement ? Et des internats ont été construits pour une partie de ces élèves ; lorsque nous n'avons pas pu construire des internats, nous avons construit des externats ; lorsque nous n'avons pas pu construire des écoles en béton, nous avons construit des écoles en bois. Nous avons formé des professeurs ; nous avons imprimé des livres, d'une façon ou d'une autre, avec du bon papier, ou du moins bon, des éditions plus luxueuses ou plus modestes, mais le fait est que l'an prochain, c'est-à-dire au cours de cette même année scolaire, au milieu de 1978, plus de 270 000 élèves passeront leur certificat d'études (applaudis­sements). C'est la première fois dans l'histoire de notre pays qu'un aussi grand nombre d'élèves recevra le certificat d'études. A Matanzas, j'ai parlé de 264 000, mais le chiffre est plus élevé. Sur 284 000 élèves inscrits au niveau du certificat d'études, nous espérons que 270 000 obtiendront leur diplôme.

Par la suite, heureusement, à mesure que disparaîtra le retard scolaire et que s'atténuera l'explosion démographique, le nombre des candidats au certificat d'études diminuera aussi. Mais en 1978, nous aurons pratiquement dans le premier cycle du secondaire le nombre d'élèves que nous avions prévu pour 1980. L'année prochaine, le nombre d'étudiants s'élèvera à près de 140 000, ce qui est très proche des objectifs prévus pour 1980. Aussi, dans notre plan pour l'année 1978, il est prévu de construire plus de 70 internats et près de 100 externats pour l'enseignement secondaire, en plus des écoles secondaires installées à la campagne et urbaines ; en outre, nous poursuivons la construction d'écoles d’orientation professionnelle, d'écoles techniques, d'écoles militaires Camilo Cienfuegos, d'écoles d'initiation aux sports, d'écoles de professeurs d’éducation physique, d'écoles d'infirmières, d’écoles de techniciens moyens de la santé, et nous avons même commencé à construire les premières écoles d'art, dans le cadre d'un programme qui nous permettra de disposer à l'avenir de deux écoles d'art par province, de deux niveaux différents. Nous commençons la construction de nombreuses facultés.

Nous pensions même que nous ne pourrions pas continuer de fournir aux élèves du secondaire des uniformes en polyester, et nous nous disions : s'il est impossible d'en faire en polyester, il est possible d’en faire en coton, et de n'importe quelle couleur. Mais nous n'avons même pas eu besoin de renoncer au polyester, car nous allons le fabriquer à Cuba dans une usine construite à cet effet. Et nous avons calculé que la production de tissu en polyester atteindra l’année prochaine entre sept et huit millions de mètres carrés, nous pourrons ainsi maintenir nos uniformes scolaires, à tous les niveaux et avec la même qualité.

Nous construisons de nouveaux jardins d'enfants : 87 jardins sont prévus pour l'année prochaine ! Nous construisons de nouvelles polycliniques – 27 seront terminées l'année prochaine ! – des cliniques dentaires, des foyers de personnes âgées et d'handicapés. Quel pays peut en dire autant ? Et ce n'est pas tout, car en ce moment où tous les pays du monde capitaliste et du monde sous-développé affrontent les problèmes du chômage et de la hausse du chômage, nous, en 1978, nous allons créer environ 120 000 nouveaux emplois.

Je crois qu'en réalité il s'agit là de choses qui, analysées d'un point de vue objectif, constituent un triomphe extraordinaire. Ah ! mais cela signifie-t-il que nous devions croire à présent que les prochaines années seront faciles ? Cela signifie-t-il que nous devions commencer à penser à la consommation ? Non!

II y a dans la Bible une vieille histoire qui parle de sept années très prospères, qui sont celles des vaches grasses, et de sept autres très mauvaises, qui sont celles des vaches maigres. Nous avons franchi des pas importants au cours des dernières années : nous avons rectifié des erreurs, nous avons acquis de l'expérience, nous avons pris une série de mesures décisives à tous points de vue, qui nous permettent de travailler désormais sur des bases beaucoup plus solides, plus réfléchies, plus profondes. En un mot, nous avons créé des conditions que nous n'avions jamais possédées auparavant ; nous avons formé un contingent très nourri de cadres dotés d'une expérience, d'un niveau qui n'a plus rien à voir avec celui des premières années : un nombre croissant de citoyens ont acquis de hautes qualifications dans tous les domaines. Je crois que nous devrons mettre à profit ces nouvelles conditions.

Lorsque nous parlions de vaches maigres, c’était pour dire que nous devons encore conserver une mentalité correspondant à l'époque des vaches maigres pendant un certain nombre d'années ! Oui, encore un certain nombre d'années ! (Applaudissements.) Nous devons aller de l'avant avec tous les instruments et les mécanismes que nous avons créés depuis le Premier Congrès dans la sphère de l'économie, et être plus austères et plus efficaces que jamais. Je dis cela parce que, en général et jusqu'à ce jour, il s'est développé, dans notre pays et au sein de nos cadres, une mentalité d'importateurs – il faut importer ceci, cela, et cela encore –, mais pas du tout une mentalité d’exportateurs. Tout le monde parlait de ce qui manquait, de ce qui serait bon, de ce qu'il faudrait. Tout le monde parlait d'importer de tel ou tel pays, du camp socialiste ou du camp capitaliste. Personne ne parlait d'exporter.

Ces années difficiles ont peu à peu créé parmi nous une conscience d'exportateurs. En un mot, nous avons besoin de posséder davantage une conscience d'exportateurs que d'importateurs, surtout en ce qui concerne les marchés où ont cours les devises convertibles. En effet, le problème était toujours posé ainsi : il faudrait ceci ou cela, telle ou telle matière première. Personne ne soufflait mot de ce que l'on aurait pu exporter, ni avec quoi on allait payer toutes ces importations. Il arrive parfois que nous n'utilisions pas tout le vieux papier que nous récupérons : nous pensons déjà même à exporter une partie de ce papier, celui que ramassent les Comités de défense de la Révolution. Nous pensons pouvoir exporter des bouteilles, du ciment, etc. Sur une production de 2 700 000 tonnes de ciment nous en consommerons entre 2 300 000 et 2 350 000 ; et nous en exporterons environ 300 000, bien que nous ayons besoin de ciment.

Je crois fermement que nous ne devons pas penser, en réalité, à une augmentation de la consommation. Il est plus important pour nous de consolider notre économie et d'en changer la structure de façon à dépendre moins de nos importations pour l'accroissement de la production et surtout de façon à dépendre moins du camp capitaliste. Cela est fondamental.

Et je crois qu'au cours des sept ou huit prochaines années, nous devrons nous consacrer essentiellement à cela ; maintenir nos niveaux, ces niveaux que nous avons pu maintenir même à des époques de crise ; ne pas penser aux satisfactions que pourrait nous procurer une amélioration quelconque de ces niveaux en 1979, en 1980 ; jusqu'en 1985 nous ne devons pas parler de niveau de vie, d'élévation du niveau de vie. Nous croyons qu'il faut expliquer clairement à notre peuple révolutionnaire qu'il s'agit de maintenir les niveaux existants, de consolider notre économie et de réduire notre dépendance du camp capitaliste pour nos importations (applaudissements), afin que notre pays, afin que notre Révolution ne soit pas exposée à ces terribles crises internationales, à ces catastrophes, à ces montées et à ces baisses des prix. Et, si les prix du sucre montaient, il ne faudrait pas nous laisser emporter par la tentation d'améliorer un peu la consommation, mais investir ces ressources dans le développement ; nous proposer, pendant une période de sept ou huit ans, de travailler fondamentalement non pas à l'accroissement des biens de consommation, mais à la consolidation et au développement de notre économie.

Si nous avions faim, si nous étions dans la misère, nous ne pourrions pas poser le problème en ces termes. Nous partons des niveaux que possède notre peuple, de ce à quoi la Révolution a consacré ses efforts essentiels pendant toutes ces années : améliorer la situation du peuple et faire en sorte que la population tout entière possède un niveau de vie, de santé, d'éducation, de loisirs, etc., décent, et pas seulement la nation qui existait alors, mais la nation qui est née après la Révolution, car ce pays s'est accru de plusieurs millions de citoyens après le triomphe de la Révolution.

Cette idée nous paraît essentielle.

Nous allons avoir davantage de ciment, bien entendu. Déjà l'année prochaine, de nouvelles cimenteries commenceront à fonctionner, deux grandes usines : l'usine de Mariel et celle de Cienfuegos, dont les dernières chaînes de fabrication seront terminées en 1979. Notre capacité de production de ciment sera deux fois supérieure à ce qu'elle est actuellement. Ainsi, nous pourrons produire plus de cinq millions de tonnes de ciment. Qu'est-ce que cela signifie ? Eh! bien, que nous allons avoir du ciment, mais que nous ne devons pas renoncer à notre marché du ciment, si nous vendons 300 000, ou 500 000, ou 600 000 ou un million de tonnes et en consommons quatre, c'est bien. Ou, si cela est nécessaire, nous déciderons de construire une autre cimenterie pour l'exportation, au cas où nous aurions besoin de plus de quatre millions. Qu’est-ce que ça veut dire ? Que même si le prix du sucre monte, nous ne pouvons renoncer au marché du ciment que nous avons créé.

On est en train de construire une nouvelle usine de bouteilles. Si nous trouvons un marché pour les bouteilles, nous aurons des bouteilles pour notre consommation et des bouteilles pour l'exportation.

Je crois qu'en mettant à la disposition de l'économie nationale un million et demi de tonnes de ciment en plus, nous pouvons faire beaucoup de choses, beaucoup plus de choses que nous n'en faisons à présent, afin de remédier avec ce ciment aux problèmes les plus critiques.

Nous sommes en train d'augmenter nos capacités dans l'industrie textile et de construire deux nouvelles usines formidables: une de 80 millions de mètres carrés et l'autre de 60 ; nous avons également agrandi les vieilles fabriques et la filature complémentaire. Que signifie conserver cette mentalité des années difficiles, penser davantage aux exportations qu'à la consommation afin de consolider notre économie ? Qu'au lieu de nous habiller avec les 140 millions de mètres carrés de plus que vont nous fournir ces usines — ce qui nous plairait énormément, bien entendu — nous pensons en exporter le plus grand nombre possible, si nous pouvons leur trouver un marché. Car, logiquement, ces deux usines, il faut d'abord les payer, il faut les payer peu à peu ; ensuite, elles consomment certaines matières premières importées de la zone capitaliste. Si nous pensons nous mettre sur le dos les 140 millions de mètres carrés, nous serons mieux habillés, c'est vrai, mais nous gaspillerons une quantité de X millions de dollars. Si nous décidons de dépenser de 20 à 30 millions de dollars pour en exporter au moins 80 millions, c'est parfait : c'est là la mentalité dont nous avons besoin.

Nous pouvons résumer ainsi ce que nous voulons dire: avec toute la force, l'expérience et la solidité acquises par notre Révolution, nous nous proposons de nous consacrer au développement de l'économie, à la consolidation de cette économie et à la modification de sa structure.

Je sais bien ce que c'est que de souhaiter l’amé­lioration de la situation du peuple. Car nous savons ce dont nous avons besoin, dans tout le pays ; ici, nous aimerions avoir un beau parc, là, un immeuble, là-bas, autre chose, plus loin, une autre. Il y a un feu qui nous consume, c'est la fièvre de toujours faire plus et de donner le maximum à notre peuple. Notre génération, cette génération de militants révolutionnaires et de dirigeants révolutionnaires, doit se résigner : c'est à elle qu'il incombe de vivre l'étape la plus dure d’une révolution. L'histoire nous réserve peut-être les plus grandes gloires, mais aussi les plus grandes souffrances, les désirs les plus ardents de bien-être matériel pour le peuple, qui n'ont pu être satisfaits dans l'immédiat. Pensez à l'URSS et pensez aux années des premiers bolcheviks, au premier soviet, aux années de Lénine, lorsque les quantités de ciment produites étaient dérisoires ; celles d'acier, ridicules ; on ne produisait pas un seul tracteur, on ne produisait rien. Aujourd'hui, les appartements sont construits par millions chaque année en URSS; mais, en ces premières années difficiles, il n'y avait rien de tout cela.

Il y a toujours une génération à laquelle échoit le travail le plus dur. Le plus dur dans un sens : dans le sens matériel ; mais moralement, il s'agit du plus stimulant. Et cette génération a un devoir : celui de créer d'autres conditions pour les générations à venir.

Notre Révolution n’a pas fait peu de choses. Nous estimons que la Révolution a fait des choses extraordinaires et que nous avons fait des progrès incroyables. Il importe de savoir concrètement, en ce moment – non du point de vue de notre Révolution, mais du point de vue de la conjoncture mondiale –, quelles sont les tâches de notre Révolution.

Et nous allons continuer de l'avant. Dans certains secteurs, nous sommes d'avis que nous avons atteint un tel niveau de croissance qu'il ne faudra pas l’élever de beaucoup dans les années à venir. Les investissements que nous avons faits dans la construction de routes, de chemins, de chemins de fer, de barrages, des micro-barrages, sont tellement élevés qu'il ne faudra par les augmenter beaucoup plus.

En ce qui concerne les jardins d'enfants, les polycliniques, les hôpitaux – il se peut que les hôpitaux en demandent encore –, le niveau atteint est si élevé qu'il ne sera pas nécessaire de l'élever beaucoup plus à l'avenir.

Je veux dire que si nous construisons actuellement 87 jardins d'enfants par an et que nous portions ce rythme à 90, nous pouvons le maintenir durant dix ans et en arriver à 900 ; ils s'accumulent d'année en année, et le rythme de construction est déjà très élevé.

Le nombre d'écoles secondaires que nous construisons chaque année est suffisamment élevé ; il n'y a pas lieu d'intensifier le rythme de construction. Je vais avancer un chiffre arbitraire qui englobe les externats et les internats : 120 ; on n’aura pas besoin de passer de 120 à 130 ou 180. Non. Si nous en faisons 120 par an, ce chiffre est si élevé que le nombre d'écoles qui s'accumulent est impressionnant.

Il faudra peut-être accroître légèrement le rythme de construction d’hôpitaux ; peut-être aussi d’hôtels, pour des raisons économiques – le tourisme par exemple –, mais à partir d'un critère économique.

Autrement dit, nous avons atteint au cours de ces années un niveau de croissance si raisonnablement élevé dans certains secteurs que ceux-ci ne requièrent plus de gros investissements.

Peut-être faudra-t-il construire un peu plus de cinémas, quelques théâtres. Nous pouvons le faire.

Toutefois, il y a un secteur dont la croissance n'est pas suffisamment élevée. Lequel ? Celui du logement. Sur quels secteurs nos efforts doivent-ils porter ? Sur les activités économiques, les investissements industriels – il faut accroître les investissements industriels –, un peu moins sur les investissements agricoles ; dans l'agriculture, il s'agit de maintenir le rythme de ces dernières années pour le défrichement de la terre, l'ensemencement, les plans d'irrigation, etc.

En ce qui concerne la construction de barrages et de micro-barrages, nous avons atteint un rythme de croissance si élevé que dans douze ou treize ans, notre pays pourra emmagasiner pratiquement toute l'eau dont il dispose. Autour de 1990, 100 p. 100 de l'eau de ce pays sera retenue par des barrages, et ceci au rythme actuel, sans avoir à l'accélérer.

C'est ainsi donc que dans plusieurs secteurs nous avons déjà atteint un niveau de croissance très élevé, qui ne doit pas être augmenté ; par contre, d'autres en ont besoin. Le logement a dû être sacrifié à ces plans. Ce problème apparaît clairement, et les heures que cette Assemblée lui a consacrées témoignent de son ampleur.

Et, bien entendu, nous pouvons faire beaucoup de lois, prendre des mesures, des accords, donner des instructions, la police peut interdire une chose ou une autre ; ce n’est pourtant pas avec cela que nous allons résoudre le problème, et nous le savons. Nous évitons ainsi certaines indisciplines, qui sont toujours négatives, mais la solution du problème réside dans la construction de logements en quantités suffisantes. Et je crois, sincèrement, que notre pays commence à avoir la possibilité de le faire.

Dans le temps, c’était le manque de ciment qui nous freinait, nous n'en avions pas assez ; nous n'en avions pas assez de fers à béton, de tuyauteries, de dalles, tout nous faisait défaut.

Nous avons construit petit à petit de nombreuses usines de ce genre, au point que nous sommes déjà en mesure de dire : nous allons résoudre le problème du logement.

En ce qui concerne les écoles, nous devons maintenir le rythme. Si nous y parvenons, nous aurons un nombre incalculable d'écoles. Et si tous les enfants ne peuvent pas s'inscrire dans les écoles installées à la campagne, ils feront leurs études en ville ; et lorsqu'à l'avenir nous pourrons construire davantage d'écoles pour les élèves du secondaire, les écoles secondaires urbaines deviendront des écoles primaires, et lorsque nous aurons assez d'écoles secondaires, nous construirons de nouvelles écoles primaires ; il faudra naturellement aussi multiplier les centres universitaires. Dans les nouvelles zones résidentielles, il faut ouvrir des écoles primaires et des jardins d'enfants.

Même en maintenant le rythme actuel dans les branches que j'ai mentionnées, il faudra multiplier les investissements dans l'industrie et dans le logement. Nous devons d'ores et déjà nous proposer, les années à venir, de fournir les efforts nécessaires, de nous engager à résoudre le problème du logement. Il ne s'agit pas d'un objectif économique, la multiplication des logements n’entraîne pas une augmentation de la production nationale ; mais il s'agit d’un besoin énorme que nous devons satisfaire. Et le fait d'entreprendre la construction de 31 000 logements en 1978 n'est qu'un début.

Lorsque nous nous proposons de résoudre le problème du logement, nous pensons aux deux aspects de la question : la construction de nouveaux logements et l’entretien des logements actuels. Je crois qu'il faudra analyser sérieusement les propositions présentées dans ce sens par la commission. Dans les deux sens : la construction et l’entretien. Nous devons travailler sur les deux fronts et augmenter aussi le nombre de logements construits chaque année, au moins dix mille par an, jusqu'au jour où nous atteindrons le rythme de cent mille logements par an, ce qui représente le minimum nécessaire. Or, nous avons la possibilité de le faire et nous commencerons ainsi à résoudre un grave problème.

Le taux de croissance de l'emploi doit également se maintenir dans les années à venir. Il s'agit d'un objectif d'une importance extraordinaire.

Dans peu de temps, nous aurons dans l'enseignement secondaire le maximum d'élèves, ce maximum étant calculé sur la base de la courbe des naissances ; et un peu plus tard, le nombre d'élèves du secondaire diminuera par rapport à la poussée démographique des années précédentes.

Le nombre d'élèves du primaire a déjà cessé d'augmenter; au contraire, il diminue à mesure que le retard scolaire est éliminé et parce que le nombre de naissances a diminué ces dernières années.

Dans les universités, le nombre d'étudiants augmentera considérablement au cours des prochaines années, ce qui est logique. Comme je l’ai déjà dit, le nombre de lits d'hôpitaux augmentera aussi, de même que celui des établissements médicaux, des polycliniques, des cliniques dentaires, des foyers de vieillards, etc. Le nombre de jardins d'enfants se multipliera lui aussi et la situation s'améliorera année après année dans tous ces domaines. 

Que pouvons-nous encore améliorer considérablement ? La qualité des services publics.

Lorsque le nombre d'élèves du secondaire, du primaire, lorsque la population en âge d'étudier aura atteint le plafond, lorsque le nombre d'installations aura augmenté considérablement, lorsque toutes ces conditions seront réunies, il nous restera un domaine illimité dans lequel nous pourrons nous développer : la qualité de l'éducation. Lorsque nous disposerons de toutes les polycliniques et de tous les lits d'hôpitaux dont nous avons besoin, il nous restera un champ d'action infini : l’amélioration de la qualité des soins médicaux. Et ainsi de suite dans tous les domaines : à l'Université, la qualité de l'enseignement universitaire ; dans le domaine du sport, la qualité du sport ; dans la sphère culturelle, la qualité de la culture et des spectacles. Autrement dit, la croissance n'est pas seulement quantitative, elle est aussi qualitative.

Certains services publics ont été négligés, nous le savons. Quelques-uns, pour des raisons objectives, mais beaucoup d'autres, pour des raisons subjectives. Nous devons travailler sans relâche pour faire en sorte qu’un citoyen qui descend dans un hôtel soit traité au mieux ; pour que les services que lui offrent un restaurant, une cafétéria, un moyen de transport soient excellents. Il s'agit d'un combat sans quartier, car il faut aussi améliorer la qualité des services publics (applaudissements).

De sorte que d'année en année, nous devons assurer notre essor économique, développer notre économie, produire davantage, et ce, en songeant non à la consommation, mais à la consolidation de notre économie ; investir les ressources disponibles non en fonction de la consommation, mais en fonction du développement, et nous développer non seulement quant au volume de la production matérielle, mais encore dans cette perspective illimitée qui consiste à améliorer la qualité des services publics.

Notre tâche est immense : il nous faut lutter sans répit contre toutes les négligences, contre tout esprit bureaucratique, contre toute indolence, sans trêve, de la même façon que nous avons lutté et que nous continuons de lutter contre la délinquance. Oui, des mesures ont été prises progressivement et d'autres le seront, et nous allons lutter sans quartier contre la délinquance, nous allons lutter sans quartier ! (Applaudissements.)

Vous avez déjà décidé de soumettre à la considération de tout le peuple l’avant-projet de Code pénal. Mais en attendant que le Code définitif soit présenté à l'Assemblée, le Conseil d'État examine un décret-loi qui prévoit un certain nombre de sanctions visant à faciliter la lutte contre la délinquance aux organismes du ministère de l'Intérieur. Nous avons décidé de faire échec à la délinquance. Et nous avons déjà commencé à lui faire échec.

Nous avons souligné la nécessité d'améliorer les services médicaux, d'éviter certaines déficiences, certaines négligences, et une importante bataille est actuellement menée à cet effet. Il faut bien dire que l'attitude de nos médecins a été identique à celle que notre peuple révolutionnaire a adoptée en toutes circonstances.

Depuis le Treizième Congrès de la Centrale des travailleurs de Cuba, le problème du repos accordé pour compenser les tours de garde effectués dans les hôpitaux était posé. Mais quelle est la situation ? Nous disposons de nombreux médecins diplômés, néanmoins, nous devons faire face à une forte demande de médecins de la part d'autres pays. Logiquement, certains sont des pays très pauvres, auxquels nous devons accorder notre aide gratuitement ; d'autre part, des pays dotés de ressources économiques sollicitent le concours de nos médecins et de notre personnel médical, moyennant paiement. Une nouvelle perspective s'ouvre donc à notre pays : la possibilité d'exporter des services techniques. Cela est intéressant dans la mesure où cela peut constituer une source de revenus supplémentaires pour un pays non-pétrolier comme le nôtre. Si bien que la demande en médecins s’accroît, à l'intérieur et hors du pays.

Cette année, 3 500 étudiants ont choisi la médecine, et le nombre d’inscriptions continuera à augmenter. Ceci dit, lorsqu’un pays disposant de ressources nous demande inopinément X centaines de médecins et est disposé à payer en échange à notre pays des honoraires plus que satisfaisants, il est bien désolant de ne pas disposer à ce moment précis des médecins nécessaires.

Ceci étant, que serait-t-il advenu si nous avions accordé les heures de repos avant et après les tours de garde ? Il aurait fallu pour cela disposer de centaines et de milliers de médecins supplémentaires.

Nous avons expliqué aux médecins les problèmes et les déficiences que cela impliquerait au niveau des services et la nécessité de renoncer au repos auquel ils ont droit après un tour de garde. Non pas que nous pensions que ce repos fût injustifié, celui-ci compensant la tension du travail fourni ; tout simplement, il n'était pas possible d'en faire une règle générale.

En fait, le principe en avait été acquis lors du Treizième Congrès ouvrier et nous avions commencé à le mettre en application, lorsque nous avons dû faire face à la situation nouvelle déjà mentionnée. Il a fallu exiger des médecins des efforts et des sacrifices et ceux-ci ont admirablement répondu à notre appel, et, dans de nombreux hôpitaux du pays, ils ont d'ores et déjà renoncé au repos qui suit un tour de garde. Récemment, des centaines de médecins de l'hôpital Calixto Garcia y ont renoncé (applaudissements).

Voici l'attitude qu'il faut adopter à l'heure actuelle, il n'y en a pas d'autre ! Inutile de nous demander si nos aspirations sont justes ; il ne s’agit pas de savoir si elles sont justes ou non, mais réalisables ou non. Le fait est qu'il nous faut des médecins à l'intérieur et hors du pays ; à l'intérieur, pour couvrir nos besoins ; à l'étranger, dans le cadre de l'aide internationaliste et d'une coopération fondée sur des bases économiques. Nous en avons besoin, notre pays en a besoin, sur ces deux fronts.

Favorisons l'inscription de milliers d'étudiants en faculté de médecine ; 3 500 maintenant, 4 000 ou 4 500 en 1980, et 6 000 ou 7.000 par la suite.

En effet, nous comptons sur de nombreux jeunes compañeros qui souhaitent étudier la médecine. Construisons toutes les facultés de médecine qui s’avèrent nécessaires pour qu’à l'avenir nous puissions accorder un repos avant et après les tours de garde et tout ce que l'on voudra, naturellement ; mais pas maintenant.

Cette génération doit se sacrifier, elle doit se sacrifier ! C'est de cela précisément qu'il s'agit, des efforts et des sacrifices que nous devons consentir maintenant, en nous privant de bien des choses que nous souhaiterions pourtant offrir au peuple. Qui ne souhaiterait pas que la consommation annuelle de tissu soit fixée à quarante mètres plutôt qu'à vingt mètres par personne ?

Il est vrai qu'en ce qui concerne certains articles de consommation, la situation est critique : les serviettes de toilette, les draps, entre autres. Lorsque nous parlons des sacrifices à consentir et des niveaux à maintenir, nous n'oublions pas tout cela. La situation est critique dans certains domaines et nous devons y remédier. Elle est critique pour certains articles de consommation, pour certains produits, et il faut y remédier, et nous espérons y remédier le plus rapidement possible. Néanmoins, sur le plan stratégique, notre principe est de penser au développement et non à la consommation, non à l'accroissement de la consommation : c'est de cela qu'il s'agit.

Nos médecins, disais-je, ont admirablement réagi, de même que les étudiants lorsqu'il s'agissait de former le Détachement pédagogique ou le Détachement internationaliste, de même que tous nos travailleurs clans les usines.

J’ai tenu à vous exposer cette situation parce que les possibilités économiques que nous réserve l'avenir sont réelles. Nous serons en mesure d’établir un plan quinquennal 1981-1985 optimum, nous serons en mesure de dresser des plans magnifiques d’année en année. Si nous n'atteignons pas tous les objectifs que nous nous sommes fixés lors du Premier Congrès, nous réaliserons au moins une grande partie des objectifs sociaux.

Le 30 décembre, nous célébrerons l'anniversaire de la prise du train blindé de Santa Clara, en inaugurant le tronçon La Havane-Santa Clara du chemin de fer que nous reconstruisons (applaudissements).

Dès le mois de mai prochain, trois des six voies de l'autoroute seront asphaltées et ouvertes à la circulation, de La Havane à Santa Clara. Nous progressons.

Notre production sucrière s'améliore, nous réalisons d'ores et déjà de grandes campagnes sucrières, des campagnes sucrières sûres. Le niveau de mécanisation s'élève considérablement ; les cannaies irriguées se multiplient à un rythme accéléré ; de nouvelles techniques sont introduites et de nouvelles variétés de canne, utilisées ; par ailleurs, de nouvelles sucreries soin construites ; et tout ceci repose sur une base déjà solide. D'année en année, notre production sucrière s'accroît, et elle s'accroît sans à-coups, ce qui est très important. Nous aurons une bonne campagne sucrière en 1978 ; néanmoins, nous pensons que celle de 1979 sera meilleure, celle de 1980 encore meilleure, et celle de 1981 encore meilleure, et ainsi de suite jusqu'en 1990 au moins. Et ces résultats, je le répète, reposent sur des bases très solides.

Nous réalisons d'importants investissements dans l’industrie du nickel de la région orientale du pays, la centrale atomique est en chantier et nous entreprendrons bientôt les premiers travaux dans la sidérurgie ; nous avons des objectifs industriels importants qui sont déjà en voie de réalisation; ils seront achevés au cours du prochain quinquennat.

Tous les accords du Congrès sur le système de direction de l'économie sont appliqués au rythme prévu, de telle sorte qu'en dépit de toutes ces difficultés mondiales, nous créons peu à peu d'excellentes conditions ; notre intégration au camp socialiste s'affirme, notre commerce avec le camp socialiste augmente et il continuera d'augmenter de 1980 à 1985, de 1985 à 1990. Autrement dit, il vaut largement la peine de faire ces efforts, de suivre ce chemin, car ce chemin ouvre d'excellentes perspectives, mais cela exige un grand effort de notre part, de la part de tous les cadres du Parti, de tous les cadres de l'administration, des organisations de masse ; il faudra faire de grands efforts !

Pour réaliser le plan que nous venons d’approuver pour 1978, il faudra faire d'importants efforts bien que la situation soit déjà meilleure ; et je crois que l'année prochaine, à la même époque, les débats sur l'exécution du plan 1978 seront très intéressants, de même que la discussion du plan pour 1979. Nous commençons déjà à travailler à l'établissement du plan 81-85, avec une marge de temps assez large. Et nous tenons à ce que vous tous, les cadres du Parti, ceux de l'État et, surtout, les députés à l'Assemblée nationale, disposiez d'un maximum d'information et puissiez avoir un maximum de participation à ces activités économiques ; il faut que vous puissiez arriver à un maximum de compréhension et de conscience. Vous devez être les défenseurs, les apôtres conscients, très conscients, de l'effort que nous devons faire et de la politique intelligente que nous devons suivre (applaudissements), sur des bases solides et scientifiques. Tel est le devoir de cette génération révolutionnaire, tel est notre devoir de députés.

Nous pouvons en dire autant du budget. C’est le premier budget que nous approuvons. Il faut s'attendre l'année prochaine à ce que le budget soit beaucoup plus étudié et plus détaillé, à ce que tout soit mesuré et calculé jusqu'au dernier centime, dans un esprit d'austérité. L'austérité a de multiples implications ; il s'agit surtout d'économiser, de résister à la tentation de dépenser. Je peux donner un exemple : quelqu’un nous a proposé d'offrir à l'Assemblée des bonbons d'un type nouveau fabriqués dans notre pays. Nous avons refusé car il faut faire des économies, tout simplement (applaudissements). Nous aurions été très heureux de distribuer des paquets de bonbons, mais nous avons choisi d’économiser les bonbons, d'économiser jusqu'au dernier centime. C'est à cela que servent le système de direction de l’économie et le budget : tout le monde saura ce qu’on dépense et à quoi on le dépense.

Il me reste encore à parler d'un service public : les transports. Les transports interprovinciaux doivent s'améliorer. Des centaines d'autocars – 300 autocars – sont mis en service ; les travaux du chemin de fer central avancent, et il ne sera plus nécessaire de faire de grands détours. Après Santa Clara, de nombreux tronçons sont déjà terminés ; d'autres seront construits parallèlement. Autrement dit, les transports interprovinciaux en chemin de fer et en autocar s'amélioreront ; il faut améliorer tous les autres moyens de transport. Nous devons éliminer totalement la crise qui s'est produite dans la capitale, non en introduisant des changements spectaculaires – cela impliquerait l’achat de milliers d’autobus –, mais en améliorant les réparations, en améliorant les services et en augmentant le parc de plusieurs centaines d'autobus. En dépit des difficultés économiques, nous avons pu faire certains investissements dans l’achat de châssis, ce qui nous permet de construire ici aussi les autobus dont nous avons besoin. Voilà tout pour les services publics.

Revenons aux budgets : vous avez pu constater que les revenus ont été calculés à 9,159 milliards de pesos. Plus de 4 milliards sont destinés à la production, aux investissements, etc.

Il y a certains chiffres de notre budget qui sont révélateurs. Par exemple, le budget destiné à la santé publique et à l'éducation : 1,532 milliards de pesos, et celui d'autres secteurs socioculturels comme la sécurité sociale. La sécurité sociale s'est vu assigner un budget de près de 600 millions de pesos. Mais ce qui a attiré l'attention des observateurs étrangers, c'est le budget que nous destinons à la défense et à l'ordre public : 784 millions de pesos. Autrement dit, nous consacrons à l'éducation et à la santé publique près du double du budget destiné à la défense et à l'ordre public. Ce fait très intéressant a attiré l'attention : notre pays a dû faire tant d'efforts et de sacrifices pour se défendre, qu'il y a de quoi s’étonner. Et si l'on tient compte du fait que notre défense est puissante – comme elle doit l'être ! –, on peut apprécier la dimension des efforts faits par le pays en matière d'éducation et de santé publique. Et ces chiffres sont exacts, nous n'y avons rien changé : pour tel domaine, tant, pour l'éducation, pour la santé publique, pour la défense, pour l'ordre public, tant. Sans crainte. Le budget de la défense et de l'ordre public représente près du 8 p. 100 du total, et nous n'avons pas peur de le dire. Ce sont les impérialistes qui nous ont obligés à créer des forces puissantes.

Et naturellement, les efforts auxquels nous oblige la défense ne se mesurent pas en pesos, pas même en centaines de millions de pesos. II s'agit d'un effort différent, difficile à mesurer, incommensurable : l'effort humain, l'effort humain que nous fournissons dans le domaine de la défense ! (Applaudissements.) Les dizaines de milliers de jeunes qui consacrent une partie de leur vie au service militaire, les dizaines de milliers d'officiers entièrement dévoués à la vie militaire, les spécialistes de nos forces armées, les hommes de notre réserve ; les heures qu'ils consacrent à leur entraînement militaire, cela vaut plus cher que tous les millions du monde. Et nous consentons volontiers tous ces efforts, parce que l'impérialisme nous a tous obligés à devenir soldats (applaudissements). Et bien que la défense et l'ordre public nous coûtent plus de 700 millions – ce chiffre inclut toutes les branches de la défense qui relèvent du ministère des Forces armées révolutionnaires et du ministère de l’Intérieure –, nous avons la satisfaction de pouvoir déclarer que nous consacrons presque le double de ressources à la santé et à l'éducation.

Nous savons pertinemment qu'il ne peut en être autrement. Si, pour que la patrie et la Révolution survivent, il avait fallu investir dans la défense le double des ressources consacrées à tout le reste, nous l'aurions fait ! (Applaudissements.) Pour nous, cette question est claire.

En un jour comme aujourd'hui, nous pouvons aborder de nombreux thèmes de politique intérieure. Nous pensons avoir traité les plus importants. Nous devons aussi parler de politique extérieure. Il est nécessaire et il convient de préciser certains points.

Comment vont nos relations avec les États-Unis ? Et bien, ça va un peu mieux. Bien sûr, en premier lieu, l'impérialisme a souffert de nombreux revers de toutes sortes, comme le Vietnam, le Watergate et autres. Le blocus économique de Cuba et les agressions contre notre pays sont discrédités ; ils sont devenus insoutenables aux yeux du monde. Les impérialistes n'ont plus d'arme morale pour défendre cette politique d'agression.

À vrai dire, de cette lutte, nous sommes sortis vainqueurs. Bientôt, très bientôt, la Révolution aura dix-neuf ans, et nous pourrions presque dire qu'elle est encore à la maternelle ! (Applaudissements.) Elle est encore à l'âge de la maternelle. Les efforts ignominieux qu'ils ont faits en vue de détruire la Révolution se sont écrasés lamentablement contre la fermeté de notre peuple, l’esprit révolutionnaire de notre peuple, la dignité de notre peuple, l'héroïsme de notre peuple. Ils ont sous-estimé le peuple cubain et ont cru qu'il était facile de se jouer de lui, de l’intimider, de le détruire, de le démoraliser. Et toute la puissance yankee – nous n'exagérons pas –ne leur a pas suffi pour atteindre leurs objectifs. Cinq gouvernements se sont acharnés contre nous : Eisenhower, Kennedy, Johnson, Nixon et Ford. Cinq présidents se sont succédé et la Révolution a résisté ! (Applaudissements.)

Un nouveau gouvernement est au pouvoir. Comme nous l'avons dit, il a fait quelques gestes positifs. Il ne s’est pas distingué par une politique d'hostilité envers notre patrie, et il ne s'est pas engagé, lors de sa campagne électorale, à suivre une politique d'agression contre Cuba. Il a fait quelques gestes et nous, en ce qui nous concerne, nous avons aussi fait quelques petits gestes. De petits gestes, car quels gestes pourrions-nous faire ?

Eh ! bien oui, nous avons facilité le retour aux États-Unis de quelques délinquants et de quelques trafiquants de marihuana étasuniens qui étaient en prison chez nous. Et aussi de quelques-uns de ceux, peu nombreux, qui étaient prisonniers pour leurs activités contre-révolutionnaires.

Les États-Unis ont étendu leur juridiction maritime à 200 milles et nous ne pouvions faire autrement qu'étendre également notre juridiction à 200 milles ; il fallait donc discuter à propos de ces 200 milles. Étant donné que nous pêchions traditionnellement dans les eaux comprises dans les 200 milles qu'ils réclamaient, il a fallu discuter. Nous sommes arrivés à quelques accords.

Le gouvernement des États-Unis a autorisé les Étasuniens à visiter Cuba. Fort bien : nous avons salué le rétablissement du droit des Étasuniens à voyager, car il s’agit d’un droit. On le leur a redonné. De notre côté, nous avons fait le geste de ne pas nous y opposer. Ils veulent venir visiter Cuba. Ils peuvent le faire.

Ils ont proposé l'ouverture d'une section des intérêts. Nous avons analysé la question et nous avons été d'accord : ils ont un bureau ici et nous en avons un à Washington.

Ce sont là les quelques pas qui ont été faits.

Mais où est l'essentiel ? Le blocus. Le blocus se maintient. Ce qu'il y a d’immoral dans cette politique des États-Unis, c'est qu'elle prétend utiliser le blocus comme une arme de négociation.

Et, à propos de geste, nous n'avons décrété aucun blocus contre les États-Unis ; c’est pourquoi nous ne pouvons pas faire le geste de lever le blocus, parce que nous n’avons jamais décrété de blocus contre les États-Unis, et nous espérons que cette Assemblée nationale ne décrétera pas de blocus économique contre les États-Unis. Il n'y en a pas. Ce sont eux qui doivent faire le geste de lever le blocus !

Nous ne pouvons faire le geste de rendre une parcelle du territoire de la Floride occupée par nos soldats, car nos soldats n'occupent aucune parcelle du territoire de la Floride. En revanche, leurs troupes occupent une parcelle de notre territoire national (applaudissements). Quel geste pourrions-nous faire ? Il nous reste quelques vieux agents de la CIA qui sont en prison chez nous. Eh ! bien, ils y resteront le temps nécessaire. Les gestes qu'il nous était possible de faire, nous les avons faits.

Je vous disais que ce qu'il y a d’immoral dans la politique des États-Unis, c'est de vouloir se servir du blocus comme d'une arme de négociation. Je te tiens par la gorge, et nous allons discuter ; je t'étrangle, et nous discutons. Cela est profondément immoral de la part du gouvernement des États-Unis.

Le blocus concerne même les médicaments ; on ne peut pas se procurer de médicaments, aucun médicament, ni d'équipements médicaux aux États-Unis.

Ils parlent d'indemnisation. Les compagnies qui exploitaient ce pays disent que leurs propriétés valaient deux milliards et qu'avec les intérêts, cela fait quatre milliards. Nous leur avons répondu que les forfaits, les crimes, les sabotages, les invasions mercenaires, la subversion, le blocus, nous ont coûté quatre milliards et, avec les intérêts, cela fait six milliards (applaudissements), que nous sommes prêts à reconnaître les pertes subies par leurs entreprises, pourvu qu'ils reconnaissent les dommages occasionnés à Cuba ; qu'ils nous paient l'indemnisation qu'ils nous doivent et nous paierons l'indemnisation aux entreprises étasuniennes lésées par les lois révolutionnaires.

Bref, il y aurait beaucoup de choses sur lesquelles on pourrait discuter, mais que se passe-t-il, qu'arrive-t-il ? Autrefois, ils parlaient de la subversion en Amérique latine, maintenant, ils n'en parlent plus. Maintenant, ils parlent d’autres choses, par exemple, du problème de Porto Rico, de l'indépendance de Porto Rico, droit que nous avons toujours défendu à travers l'histoire. Ils défendent leurs théories, nous défendons les nôtres. Mais, avant tout, nous avons affirmé qu'il s’agissait là d'une question de principes. Nous n'encourageons pas la violence à Porto Rico. Mais lorsque le Parti révolutionnaire cubain a été fondé, il l'a été pour l'indépendance de Cuba et de Porto Rico (applaudissements). Des liens historiques, moraux et spirituels sacrés nous unissent à Porto Rico. Et nous leur avons dit : tant qu'il y aura un Portoricain qui défende les idées de l'indépendance, tant qu'il y en aura un, il est de notre devoir moral et politique d’appuyer les idées d’indépendance de Porto Rico (applaudissements). Et nous assumerons ce devoir moral et politique. Nous n’avons pas besoin qu'il y ait trois Portoricains, ni trois millions qui défendent l'indépendance, il nous suffit qu’il y en ait un seul, et nous leur avons dit bien clairement qu'il s'agissait là d'un problème de principes, et que lorsqu'il s'agit de principes, nous ne négocions pas ! (Applaudissements.)

Il se pose aujourd'hui un nouveau problème, celui des soldats cubains stationnés en Angola et en Afrique. En d'autres termes, la solidarité de Cuba avec les peuples africains. Or, nous leur avons déjà dit clairement : la solidarité de Cuba avec les peuples d'Afrique ne se négocie pas ! (Applaudissements.)

Nous ne rejetons nullement l'éventualité d'une amélioration des relations entre Cuba et les États-Unis ; nous agissons aussi de la sorte par principe, car nous croyons sincèrement que la détente internationale et la paix requièrent l'effort de tous. Nous estimons que la guerre ne saurait résoudre les problèmes du monde car elle entraînerait l'extermination de l'humanité. Nous en avons parlé lors du Congrès du Parti – cela figure d'ailleurs dans les thèses du Congrès –, et nous avons la conviction chaque jour plus forte que la lutte pour la détente internationale et pour la paix est un devoir de tous les peuples et de tous les hommes conscients du monde.

Ainsi, la raison première, la raison fondamentale pour laquelle nous sommes prêts à œuvrer en faveur de l’amélioration des relations avec les États-Unis réside dans ce principe. Nous connaissons le monde ; nous connaissons les problèmes qui se posent au monde en général et au monde sous-développé ; nous entrevoyons déjà les problèmes terribles qui attendent l'humanité de demain, soit la génération de nos élèves du secondaire, de nos enfants encore à la crèche ; nous connaissons les problèmes que ces générations devront affronter dans l'avenir en tant que partie intégrante de l'humanité. Les problèmes qui se poseront au monde de demain sont l'alimentation, la croissance incontrôlée de la population, la contamination de l'environnement, les problèmes énergétiques, la pénurie de ressources naturelles, le développement. Nous sommes convaincus que s'il ne règne pas un véritable climat de paix dans le monde, la solution de ces problèmes ne pourra même pas être envisagée.

Nous nous en tenons simplement à nos principes, et s'il y a une perspective d'amélioration, nous devons travailler dans ce sens et nous le faisons. Mais apparemment, le gouvernement des États-Unis ne s'en rend pas compte. Il s’imagine peut-être que nous sommes pressés, que nous sommes la proie de l'angoisse. Il se berce peut-être d'illusions en croyant que nous avons besoin de lui, que nous ne pouvons pas vivre sans entretenir de relations avec lui.

Il croit peut-être que nous voulons améliorer ces relations par intérêt économique et matériel. Évidemment, cela conviendrait au pays sur le plan économique, matériel ; mais cela n'est que relatif, pas décisif – que cela soit clair –, cela n'est absolument pas décisif. Ce sont les relations que nous entretenons avec la communauté socialiste et avec l'URSS qui sont décisives. Celles-ci sont décisives ! (Applaudissements.) Et les États-Unis ne pourront jamais entretenir de telles relations avec nous, car la nature de l'impérialisme les en empêche.

En quoi consiste aujourd'hui leur politique sucrière ? Ils imposent des droits de douane énormes à l'importation d'un produit superdéva­lué ; alors que le prix du sucre sur le marché mondial est de 7 ou 8 cents la livre, ils établissent des tarifs douaniers de 3 ou 4 cents la livre en vue de protéger leur production sucrière, portant ainsi préjudice à plus de soixante pays, dont certains ne l'ont pas volé, pour faire honneur à la vérité.

Nous qui sommes de l'autre côté de la barrière, nous suivons tranquillement le fil des événements. Ceux qui se sont lancés, tels des fauves affamés, sur les quotas sucrier que Cuba possédait sur le marché des États-Unis, ceux qui ont vendu leur âme à l'impérialisme en échange d'une partie de nos quotas et qui se sont prêtés aux manœuvres et aux crimes contre Cuba pour obtenir une partie de notre quota, ceux qui se sont lancés avec un égoïsme impitoyable sur nos quotas, reçoivent maintenant la monnaie de leur pièce. Il n'y a plus de quotas sur le marché des États-Unis; ce qu'il y a, ce sont des tarifs douaniers très élevés. Voilà un exemple de l'égoïsme du capitalisme : il adopte des lois protectionnistes pour se défendre, même si le reste du monde doit s'écrouler. Voilà en quoi consiste leur politique sucrière. Sont-ils prêts à faire comme l'URSS, à nous acheter le sucre à des prix excellents, à nous payer le sucre plus cher à mesure qu’augmente le prix des produits qu'ils nous vendent, à acheter pratiquement tout le sucre que nous pouvons produire, ce qui nous a permis d'établir de magnifiques rapports d'échange avec l'URSS ?

Dans la vie, et surtout dans la vie révolutionnaire, il faut être clair, et le gouvernement des États-Unis doit savoir clairement qu'une amélioration quelconque des relations de Cuba avec les États-Unis ne modifiera en rien les liens étroits de notre peuple et de notre Révolution avec l'Union soviétique (applaudissements). Que le gouvernement des États-Unis ne se fasse aucune illusion ; toute stratégie fondée sur cette idée est vouée à l'échec. Ce gouvernement n'est pas de ceux qui se laissent acheter ou vendre.

Et vous savez – je ne veux pas les citer, mais il y en a plusieurs – que l'impérialisme a joué avec certains de ces gouvernements, que l'impérialisme a joué avec certaines pseudo-révolutions et avec leurs dirigeants, qu'il les a poussés à rompre avec le camp socialiste ; il les a poussés à la trahison, il les a achetés. Mais il est un gouvernement de ce monde sous-développé et de ce continent que les impérialistes ne pourront jamais acheter, qu'ils ne pourront jamais manipuler : le gouvernement cubain ! (Applaudissements prolongés.)

Et au nom de quoi les États-Unis peuvent-ils parler des soldats cubains en Angola et de la solidarité de Cuba avec l'Afrique ? En quoi cela concerne-t-il les relations entre Cuba et les États-Unis ? Comment les États-Unis peuvent-ils parler de soldats stationnés dans un autre pays et faire de la présence de nos soldats en Angola ou dans tout autre pays d'Afrique un obstacle à nos relations ? C'est ce qui me fait dire que le gouvernement des États-Unis ne comprend apparemment rien à notre politique de principes ; il ne comprend pas notre politique et il ne comprend aucun principe. A notre avis, le fait d'avoir monté récemment dans la presse des États-Unis un grand scandale, une campagne de grande envergure autour de la présence d’assesseurs cubains dans plusieurs pays d'Afrique, est un acte de mauvaise foi auquel le président des États-Unis a été entraîné sous la pression de certains de ses conseillers. Les informations divulguées dans le cadre de cette campagne étaient souvent fausses, car on a prétendu qu'il y avait des assesseurs dans des pays où il n'y en a pas ; et dans des pays où il y en a et, dans certains cas, on a gonflé les chiffres. L'intention de chantage nous a paru évidente.

Au nom de quels principes moraux les États-Unis peuvent-ils parler des soldats cubains stationnés en Afrique, eux qui ont des soldats sur tous les continents, et qui ont plus de vingt bases militaires, par exemple, aux Philippines, des dizaines à Okinawa, au Japon, en Asie, en Turquie, en Grèce, en RFA, en Europe, en Espagne, en Italie et partout ? Au nom de quels principes moraux les États-Unis peuvent-ils brandir l'argument de nos soldats en Afrique, alors que leurs soldats occupent par la force une partie de Panama ? Au nom de quels principes moraux peuvent-ils parler de nos soldats stationnés en Afrique, alors que leurs soldats occupent une partie de notre propre territoire national, la base navale de Guantánamo ? (Applaudissements.)

S'il nous faut parler des soldats qui sont là où ils ne doivent pas être, mais qui, eux, ont beaucoup à voir avec les relations entre Cuba et les États-Unis, les seuls soldats dont il peut s'agir sont ceux qui occupent la base navale de Guantánamo. C'est le seul point en matière de soldats stationnés dans un autre pays dont nous puissions discuter.

Il serait ridicule de notre part de déclarer au gouvernement des États-Unis que pour établir ou améliorer les relations entre Cuba et les États-Unis, il doit retirer ses troupes des Philippines, de Turquie, de Grèce, d'Okinawa ou de Corée du Sud. Si l'envie les prend de s'en retirer, qu'ils le fassent quand bon leur semble, mais il serait ridicule que nous leur disions : il faut que vous retiriez vos soldats de la RFA, parce que, sinon, il ne peut pas y avoir de relations entre nous. Ou encore de leur dire : nous sommes très fâchés de voir que vous avez des soldats en RFA, alors, pas de relations. Ils diraient que nous sommes fous. De quel droit peuvent-ils donc nous tenir ce langage ? Ce n’est pas la logique, l’équité, l'égalité qui leur dicte ce langage. C'est l'insolence impériale ! L'insolence impériale ! Les impérialistes, eux, peuvent avoir des soldats et des assesseurs partout dans le monde et nous, nulle part. Telle est l'idée que se fait le gouvernement des États-Unis de la logique, de l'équité et de l'égalité.

En Afrique, nous appuyons des gouvernements qui ont sollicité notre coopération, des gouvernements constitués, qui sont des gouvernements révolutionnaires et progressistes. Nos assesseurs militaires n'assistent aucun gouvernement fasciste, nos assesseurs n'assistent aucun gouvernement réactionnaire, nulle part dans le monde. Nos assesseurs militaires assistent des gouvernements qui aident le peuple et qui soutiennent le peuple, qui sont révolutionnaires ou progressistes (applaudissements).

Nous n'avons pas d'assesseurs militaires dans des pays comme le Chili – pour ne citer qu'un exemple – ; nous n'avons pas d'assesseurs militaires dans les pays fascistes. Outre toutes les bases qu'ils entretiennent dans le monde, les États-Unis ont des instructeurs et des assesseurs militaires dans des dizaines de pays, et parfois par milliers, comme en Iran, en Arabie saoudite ou autres pays du même acabit. Les États-Unis ont des assesseurs militaires dans presque tous les pays d’Amérique latine ; les États-Unis ont envoyé des assesseurs militaires aux gouvernements les plus répressifs, les plus sanguinaires et les plus réactionnaires de ces pays frères pour former leurs armées.

La différence essentielle entre notre aide et celle des États-Unis réside dans le fait que les États-Unis n'assisteront jamais un peuple révolutionnaire ou progressiste ; ils assisteront toujours, en règle générale, des gouvernements réactionnaires et fascistes. Cuba révolutionnaire assiste des gouvernements révolutionnaires et progressistes.

De quel droit les États-Unis peuvent-ils s'en prendre à l'aide offerte par notre peuple ? Et de quoi se plaignent-ils, je vous le demande ? Ils ont essayé d'isoler la Révolution et de la détruire. La Révolution a établi des liens avec le Tiers-monde, et ces liens sont solides, et nous serons toujours fidèles à cette politique. Nous ne troquerons pas ces liens contre un sourire des États-Unis. Nous ne troquerons pas ces liens contre une quelconque concession des États-Unis, ces liens ne se négocient pas !

Notre Révolution a beaucoup de soldats et d'excellents soldats, des dizaines de milliers d'officiers dans l'armée régulière et dans la réserve ; des centaines de milliers de combattants dans l'armée régulière et dans la réserve. La responsabilité en revient à l'impérialisme yankee, qui nous a obligés à prendre ces mesures élémentaires pour survivre face à ses agressions et à son blocus.

Nous reconnaissons que nous appuyons de nombreux pays d'Afrique et que nous leur avons envoyé des assesseurs ; cela est clair, très clair, et cela ne se négocie pas (applaudissements). Cela n'a rien à voir avec la nouvelle administration des États-Unis, car cela obéit à la politique traditionnelle de notre Révolution. Nous aidons et nous aiderons l'Angola ! (Applaudissements.) Nous aidons et nous aiderons le Mozambique ! (Applaudissements.) Nous aidons et nous aiderons la révolution éthiopienne ! (Applaudissements.) Si c'est pour cela que les États-Unis nous imposent leur blocus, qu'ils continuent!

Pourquoi les États-Unis ne décrètent-ils pas un blocus contre l'Afrique du Sud, ce pays raciste, fasciste, dont les soldats commettent d'innombrables crimes en Afrique et où une infime minorité opprime vingt millions de Noirs ? Pourquoi ne décrètent-ils pas un blocus contre la Rhodésie, où trois cent mille fascistes blancs oppriment six millions d'Africains, et dont les soldats commettent des massacres inqualifiables d'hommes, de femmes et d'enfants au Mozambique ? Nous avons vu des photos des fosses où ils jettent les enfants, les femmes, les vieillards assassinés, comme le faisaient les fascistes d'Hitler. Pourquoi ne décrètent-ils pas le blocus contre eux ? Et pourquoi pas contre Pinochet ? Non, ils décrètent le blocus contre Cuba. Ce que les peuples comprennent, ce que comprennent parfaitement les peuples africains, c'est que tant que les impérialistes yan­kees soutiendront l'Afrique du Sud, la Rhodésie, les gouvernements répressifs et réactionnaires d'Afrique, nous resterons aux côtés des peuples révolutionnaires et progressistes d'Afrique ; nous luttons contre le fascisme en Afrique, nous luttons contre le racisme en Afrique.

L'histoire témoignera à jamais que notre rôle est infiniment honorable, et que celui de l'impérialisme est honteux. Et comme les peuples d'Afrique ont confiance en nous, ils sollicitent notre coopération. Et nous n'aidons pas seulement les gouvernements de l'Angola, du Mozambique, de l'Éthiopie et d'autres gouvernements africains, nous aidons aussi les mouvements de libération de Namibie, du Zimbabwe et d'Afrique du Sud (applaudissements). Nous les aidons et nous les aiderons ! (Applaudissements.) Et pour l'impérialisme, la bataille de l'Afrique australe est perdue d'avance, quoi qu'il fasse.

Notre politique est on ne peut plus claire : nous ne négocions pas les principes, nous ne nous laissons intimider par aucune espèce de campagne, par aucune espèce de pression.

Pour les raisons que nous venons d'expliquer, nous sommes sincèrement partisans de la paix et nous luttons par principe pour l'amélioration des relations entre tous les pays sur des bases justes. Aucun avantage matériel, quelle que soit sa nature ou son importance, ne nous fera trahir la confiance des peuples angolais, mozambicain, éthiopien et des peuples héroïques qui luttent contre le fascisme et le racisme en Afrique. Tout ceci doit être clair pour les États-Unis.

Aux gestes positifs faits par l'administration actuelle, nous avons répondu par des gestes positifs dans les limites de nos possibilités. Mais si le gouvernement des États-Unis persiste dans une politique de chantage et de pression, dans une politique et une conduite immorales à l’encontre de notre pays, en maintenant son blocus comme une arme ignoble et criminelle contre notre peuple ; si le gouvernement des États-Unis croit que l’amélioration de nos relations implique de la part de notre peuple un abandon de ses principes, alors, de la même façon que nous avons lutté contre cinq présidents des États-Unis, nous lutterons contre un sixième président des États-Unis (applaudissements). S'ils persistent dans leur blocus, tant pis pour eux. Car plus le blocus durera, plus nous formerons de soldats ! (Applaudissements.) Plus ils agresseront notre patrie, plus celle-ci aura des soldats aguerris !

La confiance que les révolutionnaires du monde entier ont déposée dans notre peuple est pour Cuba un immense honneur. Ce n'est pas pour rien que notre pays sera l'année prochaine le siège du Onzième Festival ; ce n'est pas pour rien que notre pays sera, en 1979, le siège de la Conférence des non-alignés (Applaudissements). La vie révolutionnaire a assigné ces tâches à notre pays et nous serons conséquents avec nos principes et nous remplirons nos obligations. Si le blocus dure, peu importe. Si le gouvernement des États-Unis ignore les possibilités d'améliorer ses relations avec Cuba, lui seul en assume la responsabilité.

Les États-Unis aiment parfois s’immiscer dans les affaires internes d'autres pays. Ils parlent de prisonniers contre-révolutionnaires à Cuba. Bien sûr, ce sont eux les responsables de cela, car ils ont encouragé les contre-révolutionnaires de la même façon qu'ils ont encouragé les détournements d'avions, de la même façon qu’ils ont encouragé les actions terroristes, de la même façon qu'ils ont encouragée et ourdi les complots destinés à assassiner les dirigeants de la Révolution cubaine. Les États-Unis devraient même avoir honte de regarder ce pays en face, à cause des crimes qu’ils ont commis contre notre peuple.

Plus tard, la piraterie s'est retournée contre eux, le terrorisme s'est retourné contre eux, et voyez le résultat : à présent, les terroristes contre-révolutionnaires d'origine cubaine qu’ils ont entraînés veulent gouverner les États-Unis, poser des bombes dans les entreprises étasuniennes qui entretiennent des relations avec Cuba, ou dans les bureaux des compagnies aériennes qui veulent effectuer des vols à Cuba. Ils ont élevé des corbeaux et les corbeaux leur crèvent les yeux.

De la même manière, ils ont fomenté la contre-révolution dans notre pays, ils ont encouragé la vermine contre-révolutionnaire. Les délinquants contre-révolutionnaires ont cru que les impérialistes les sortiraient un jour de prison ; or, ce ne sont pas eux qui les en ont sortis ; c’est nous qui, grâce aux plans de réhabilitation, de caractère volontaire, et aux plans de travail, de travail rémunéré, aux méthodes vraiment humaines de la Révolution, avons libéré des milliers et des milliers de contre-révolutionnaires. Nous pouvons dire qu'il ne reste dans nos prisons même pas 20 p. 100 des contre-révolutionnaires qui y étaient enfermés il y a douze ans. Pas même 20 p. 100 ! A certaines époques, nous en avions plus de 15 000. C’est vrai.

Notre Révolution a toujours été diaphane, très pure. Jamais la Révolution n'a permis la torture. Jamais la Révolution n'a assassiné, jamais il n’y a eu de personnes portées disparues, jamais il n'y a eu d'état d'urgence, etc., etc. ; jamais la Révolution n’a envoyé de bataillons dans les rues pour lutter contre les ouvriers, contre les paysans, contre les étudiants. Certes, le peuple est descendu dans la rue, le peuple est toujours descendu dans la rue, mais aux côtés de la Révolution (applaudissements).

Des gouvernements de ce continent, alliés des États-Unis, font disparaître des milliers de personnes, torturent, assassinent. Ce qui n'empêche pas les États-Unis de faire du commerce avec eux, de leur concéder des crédits, de leur vendre des armes, de leur envoyer des assesseurs militaires.

Nous avons des lois révolutionnaires rigoureuses, mais jamais un homme n'a été sanctionné dans ce pays si ce n’est devant un tribunal et conformément à la législation révolutionnaire. Notre Révolution a toujours eu une conduite véritablement irréprochable en ce qui concerne ses méthodes et ses procédés.

De temps en temps, aux États-Unis, des politiciens aiment se souvenir de certains contre-révolutionnaires notoires qui sont actuellement en prison, bref, ils s’inquiètent du sort des prisonniers contre-révolutionnaires cubains. En revanche, ils ne soufflent mot des héroïques Portoricains qui, comme Lolita Lebrón et ses compagnons, croupissent depuis plus de vingt-cinq ans dans les prisons immondes des États-Unis (applaudissements). Ils se soucient des prisonniers contre-révolutionnaires qui, sur l'instigation des impérialistes, ont commis des crimes contre notre patrie, et ils ne parlent pas des dizaines et des dizaines de milliers de Noirs qui, poussés par le chômage et la faim, ont échoué dans les prisons des États-Unis. Ils aiment réclamer la liberté des contre-révolutionnaires cubains qui sont en prison. Nous leur disons : soit, libérez vous-mêmes un nombre égal de Noirs étasuniens qui, en raison du régime d'exploitation, de faim, de misère, de discrimination, de chômage auquel est soumise la population noire, ont été jetés en prison, alors, nous serons prêts à mettre en liberté tous les prisonniers contre-révolutionnaires qui restent à Cuba (applaudissements).

En voilà des façons de venir nous imposer des conditions, de venir dicter à un pays ce qu'il doit faire ou ne pas faire. Un système de gouvernement qui n'a rien à apprendre à personne ! Et le plus curieux, c'est que bon nombre de ceux qui s’inquiètent du sort de ces contre-révolutionnaires ont été les responsables de la guerre du Vietnam et de l'assassinat de millions de Vietnamiens ; ils ont été les complices de dizaines de régimes répressifs et réactionnaires du monde entier qui ont assassiné des centaines de milliers de révolutionnaires. Au nom de quels principes moraux osent-ils parler des prisonniers contre-révolutionnaires à Cuba ? Au nom de quels principes moraux osent-ils parler des droits de l'homme ?

Nous sommes des révolutionnaires conscients, éclairés, et nous ne nous laissons pas duper par des slogans ridicules, par des mots vides de sens.

Carter parle des droits de l'homme. La question du blocus contre Cuba indiquera s'il existe un minimum de sincérité dans ses paroles. Un gouvernement qui maintient un blocus criminel, qui essaie d'affamer des millions d'êtres humains, peut-il parler des droits de l'homme ? Qu'il appuie ses paroles par des actes. Car, je le répète, la question du blocus contre Cuba indiquera s'il existe un minimum de sincérité dans ses paroles. Subjectivement, on peut croire que ce minimum de sincérité existe ; objectivement, c'est impossible dans un système politique et social comme celui des États-Unis.

Comment une société capitaliste par excellence, une société exploiteuse par excellence, une société dans laquelle des millions et des millions de descendants de Mexicains sont discriminés, où les Portoricains — qui sont également des millions aux États-Unis — sont discriminés et méprisés, où les Latino-Américains sont méprisés, où les Indiens ont été exterminés, où des dizaines de millions de Noirs sont discriminés, peut-elle parler des droits de l'homme ? Comment, dans un tel pays, trouver des bases objectives pour se poser en champion des droits de l'homme ?

Ce genre de discours ne trompe plus aucun d'entre nous. L'impérialisme n'a plus rien à dire, il n'a plus aucun message à adresser aux peuples, il ne lui reste plus que des mots creux à servir aux naïfs qui pourraient encore s’y laisser prendre dans le monde. Trêve de plaisanterie !

Entre nous, nous savons que nos deux régimes sociaux sont très différents, que nous sommes très différents. S'il existe un jour des relations entre nos deux pays, ces relations devront être basées sur le respect mutuel et l'égalité. Et nous sommes disposés à établir ces relations tout en sachant que nos régimes sont et seront profondément différents.

Quant à nous, nous savons fort bien ce que sont les droits de l'homme, nous qui avons balayé de notre patrie les crimes, les injustices économiques et sociales qui y étaient commises jour après jour, heure après heure, minute après minute, seconde après seconde; nous qui avons éliminé le jeu, la prostitution, la discrimination, la mendicité, le chômage; nous qui avons créé le pouvoir du peuple, le véritable pouvoir du peuple, le pouvoir que nous exerçons aujourd'hui; nous qui avons jeté les bases de cette magnifique Révolution au sein de laquelle les masses, le Parti, les dirigeants sont si étroitement unis. Ça, oui, c'est de la démocratie, cette assemblée, c'est de la démocratie, ces débats, c'est de la démocratie ! (Applaudissements.) Ce qui existe aux États-Unis, c'est le gouvernement de l'oligarchie, par l'oligarchie et pour l'oligarchie, et dans notre pays, c’est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple dont parlait Lincoln. Aux États-Unis, c’est le gouvernement des bourgeois, par les bourgeois et pour les bourgeois, et dans notre patrie, c'est le gouvernement des travailleurs, par les travailleurs et pour les travailleurs (applaudissements).

En matière de politique, les États-Unis ont beaucoup à apprendre de nous, alors que nous n'avons rien à apprendre des États-Unis. Car eux, ils appartiennent à la société de classe, à la préhistoire politique de l'humanité, et nous, nous appartenons à la nouvelle histoire humaine. En effet, comme l'a dit Marx, c'est lorsque le régime d'exploitation de l'homme par l'homme disparaîtra que commencera la véritable histoire de la société humaine (applaudissements).

Du point de vue social et politique, nous avons un siècle d'avance sur eux. Telle est la stricte vérité. Ils ont commencé à s’émanciper lorsque nous étions encore une colonie espagnole, vers la fin du XVIIIe siècle. Ils ont commencé avant nous, mais nous sommes allés plus vite qu'eux. Et les immondices du capitalisme ne sauraient être comparées à l'essence réellement humaine et fraternelle du socialisme (applaudissements). Du point de vue idéologique, l'impérialisme est très faible et du point de vue économique, il traverse une crise sans issue.

Je vous disais tout à l'heure quelle doit être à notre avis la politique économique de notre pays, celle que nous devons suivre dans les sept ou huit années à venir pour assurer le développement, le changement de nos structures, et il ne s’agit pas d’une politique de consommation. C'est ainsi que nous bâtirons un avenir sûr.

Si le blocus dure encore dix ans, peu importe ; si le blocus dure encore cinquante ans, peu importe (applaudissements). Cela doit être bien clair pour le gouvernement des États-Unis. Et lorsque ces choses seront assez claires pour le gouvernement des États-Unis et pour ses assesseurs, il existera alors des critères réels et objectifs sur la base desquels nous pourrons discuter, négocier, entretenir des relations commerciales et diplomatiques.

C'est là l'essentiel de ce que je voulais vous dire aujourd'hui en matière de politique extérieure.

Notre Révolution aura bientôt dix-neuf ans. Nous n'avons jamais été très portés à la célébration solennelle de l’anniversaire des grands événements, car il nous faudrait en fêter beaucoup. Le triomphe de la Révolution est en soi un événement d’une importance extraordinaire, et nous avons pour habitude d'en fêter l'anniversaire sans solennité, au plus profond de notre conscience. En réalité, à la veille de ce dix-neuvième anniversaire, nous pouvons être fiers et satisfaits de l'œuvre de notre Révolution (applaudissements). Je n’ai jamais envisagé l'avenir avec tant de clarté et d'optimisme qu'aujourd'hui, à la veille du dix-neuvième anniversaire de la Révolution !

Ce sont ces sentiments de satisfaction, de fierté et d'optimisme que je souhaitais partager avec vous aujourd'hui. Et je suis convaincu que nous continuerons d’avancer dans la voie tracée, de lutter avec courage, avec honnêteté, avec héroïsme, en consolidant ce qui est déjà fait et en donnant de nouvelles dimensions à l'œuvre de la Révolution, pour que les générations futures soient fières de nous.

La patrie ou la mort, nous vaincrons ! (Ovation.)

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